4

Peggy doit ralentir car elle arrive à la hauteur de la propriété qui sert de siège à l’EAC. Sa colère est en partie tombée, et elle se demande si, après tout, elle ne s’est pas enflammée un peu artificiellement dans le seul but d’oublier le problème du tube d’acier découvert dans l’épave.

Plus elle y réfléchit, plus elle est persuadée qu’il s’agit d’une nouvelle machination de Boyett. Veut-il, par ce moyen, lui faire comprendre qu’il peut la compromettre aux yeux de la DEA ? Ce serait assez dans son style. Que contient le flacon ? De la morphine… ou simplement de l’eau distillée ? Elle aurait bonne mine si elle se pointait chez les flics avec une bouteille remplie d’eau du robinet. C’est pour le coup qu’elle passerait pour cinglée !

Elle immobilise le véhicule devant l’entrée du Club des Dévorés Vifs. C’est une belle maison dans le style Bahamas années 50, avec des jalousies à toutes les fenêtres. C’était jadis un bordel, comme en témoignent les coquilles Saint-Jacques renflées, sculptées dans le bois des poutres, des rambardes, et dont la fonction était de prévenir les matelots de la véritable nature du lieu. Le jardin n’est plus entretenu depuis longtemps, et les gumbo-limbos ont proliféré, noyant la véranda dans une jungle de branches ramifiées à l’excès qui dissimulent les fenêtres du rez-de-chaussée. Les raisiniers ont fait le reste.

La jeune femme remonte l’allée cimentée. Boyett a fait enlever les gravillons et couler une dalle pour faciliter l’accès aux handicapés. Les graviers déstabilisaient les béquilles. Il a aussi installé un pan incliné qui permet aux fauteuils roulants d’atteindre aisément la véranda. Une plaque de cuivre bien astiquée brille au soleil.

EATED ALIVE CLUB, ça sonne comme une mauvaise blague mais il ne faut pas s’y tromper, les gens qui entourent Boyett sont du bois dont on fait les fanatiques. Incapables de se réinsérer dans la société après leur accident, ils s’accrochent à leur revanche. Larker Boyett est leur gourou, ils sont ses féaux, ses commensaux, ses croisés. La haine du requin leur tient lieu de tables de la loi. Peggy ne les aime pas. Ils ont souffert, c’est vrai, leur vie a été saccagée, c’est également vrai, mais ils se servent de leur infirmité comme d’un passe-droit qui les affranchirait pour l’éternité des lois communes. La jeune femme pense que c’est un alibi un peu facile.

Elle escalade le pan incliné. Borowsky est là, dans le vestibule, un bidon de cire à la main : il astique une table espagnole. Il approche de la trentaine, il a été champion de surf avant le drame, il aurait pu devenir une vedette internationale sponsorisée par les plus grandes marques américaines, mais, un beau matin, un requin tigre a réduit sa planche en miettes et lui a arraché le pied gauche avant de le mordre à la poitrine. Borowsky en conserve une horrible cicatrice qu’il exhibe avec fierté, comme tous les membres du club. « 400 points de suture », annonce-t-il fièrement lorsqu’il surprend un regard braqué dans sa direction. On dirait la créature du baron Frankenstein. Son torse, ouvert en deux dans le sens de la hauteur, a été en partie broyé par les mâchoires du requin capables de déployer une pression de 3 tonnes au centimètre carré. Le sternum enfoncé, les côtes en miettes, tout a été remis en place tant bien que mal, et le résultat n’est pas un chef-d’œuvre d’esthétique, il faut bien l’avouer. Le plus effrayant, c’est la marque des dents, en creux, un pointillé qui s’étend depuis le haut de la hanche jusqu’au creux de l’aisselle. On a l’impression que Borowsky s’est enfui d’une salle de dissection en cours d’autopsie… et qu’il s’est recousu lui-même, avec les moyens du bord.

Tous les membres du Club sont pareillement marqués. Boyett les encourage à refuser le port des prothèses. Peggy juge cet exhibitionnisme malsain.

— Il est pas là, grogne l’ancien surfeur en lui jetant un coup d’œil hargneux. L’est parti distribuer les brochures. Va pas tarder à rentrer.

La jeune femme pénètre dans la demeure qui sent l’encaustique. Décoration maritime. Beaucoup d’objets en cuivre : sextant, boussole, astrolabe, longue-vue. Aux murs : des mâchoires de requin, grandes, petites, ou gigantesques, avec des étiquettes qui pendent, les mêmes qu’on attache aux pièces à conviction dans les procès. Boyett veut sans doute suggérer de cette façon qu’il s’agit d’armes mortelles. Au-dessus du bar, on a aligné les photographies de blessures, encadrées telles des gravures anglaises. Difficile de les regarder sans se sentir gagné par la nausée.

— Pourquoi vous revenez ? grogne Borowsky. Vous savez bien qu’on ne peut pas adhérer au Club si l’on n’a pas subi au moins 200 points de suture.

En plus c’est vrai ! C’est bel et bien la condition sine qua non posée par Larker Boyett afin d’écarter les aventuriers en mal de sensations fortes. Pour être inscrit sur les listes du groupe, il faut pouvoir faire la preuve d’une amputation majeure ou porter, inscrite dans sa chair, la trace d’une morsure de première grandeur. La hiérarchie du Club est fondée sur l’importance de la blessure subie et des dommages psychologiques qu’elle a entraînés : chômage, divorce, impuissance sexuelle, perte de statut social, ruine. Les adhérents apprécient beaucoup ce classement qui, pensent-ils, leur rend enfin justice.

« Considérez vos plaies comme des galons gagnés au combat ! » leur répète Boyett, qui n’est pas – paradoxalement – le plus marque du groupe. Toutefois, il reste le fondateur du Club, et ses moyens financiers lui permettent de tirer les ficelles en toute indépendance. Sa conversation est pleine de métaphores guerrières, il aime se donner des airs de général embusqué au fond de son bunker et préparant quelque sanglante contre-offensive. Il a bien manœuvré, et ses adhérents le vénèrent comme un dieu vivant. D’ailleurs il subvient aux besoins de nombre d’entre eux, que leurs infirmités avaient condamnés à la clochardisation faute d’une bonne assurance. Il a regroupé autour de lui une douzaine de victimes qui lui doivent tout, et dont il a fait sa garde prétorienne.

Peggy s’assied dans un fauteuil en rotin. Des piles de brochures d’information encombrent le plancher. Boyett se sert de ces tracts pour répandre la panique chez les vacanciers. Il distille un mélange savant d’hystérie et d’anecdotes véridiques mais qui, tirées de leur contexte, prennent un tour effrayant. Il généralise à outrance des accidents exceptionnels, misant sur le sensationnalisme des clichés qu’il a collectés ici et là.

Peggy entend la Cadillac du maître des lieux s’arrêter devant la maison. Elle se raidit, prête à l’affrontement. Elle doit rester calme car Boyett se contrôle à merveille. On dirait même qu’il n’a pas de nerfs. Elle entend Borowsky chuchoter : « L’autre conne, la Meetchum, elle est encore là… » Le fauteuil roulant crisse sur le plan incliné.

— Chère ennemie, s’exclame Boyett en franchissant le seuil. Quelle joie de vous accueillir, êtes-vous venue me dire que vous acceptez enfin ma proposition ?

Il est très beau, et Peggy éprouve toujours un petit choc au creux du ventre quand elle le voit. Il est rare de rencontrer un spécimen d’humanité masculine aussi somptueux. La perfection de ses traits lui a épargné ce côté efféminé – équivoque qu’ont souvent les mâles trop séduisants. Il ne se donne même pas la peine de charmer ; en fait il se comporte comme un moine, un ermite, détaché à jamais des attraits de la chair féminine.

D’un signe de la main, il signifie à Peggy de passer dans son bureau. La pièce sent la fumée de cigare et l’eau de toilette Armani. Les lambris sont tapissés de photographies de mode. On y voit Boyett faisant la couverture de différents magazines. Boyett posant pour des publicités de sous-vêtements, d’eaux de toilette, de cravates ou de chaussures. Cet étalage est un peu insistant. On comprend bien qu’il est là pour souligner tout ce que le président du Club a perdu. D’autant plus qu’on a malicieusement intercalé entre ces photos des clichés pris à l’hôpital, et montrant Larker sur son lit de souffrance, les traits tirés.

Peggy attaque bille en tête, elle parle du piège en forme de mâchoire déposé dans son jardin. Boyett l’écoute en hochant la tête tel un médecin qui prend mentalement note des symptômes d’un malade.

— Je ne suis pour rien dans cette histoire de piège à loup, affirme-t-il. Je pense que c’est là le fait d’éléments du Club incontrôlés. Je ne suis pas un chef militaire, je n’ai aucun pouvoir sur ces gars-là.

Il ment, bien sûr.

— Je comprends que vous deveniez nerveuse, reprend-il. Le danger n’est pas à négliger. Mais plus vous tarderez à nous aider, plus l’exaspération de mes pauvres compagnons ira croissant. Ces types ont tout perdu, ils sont devenus des objets de répulsion pour leur femme, leur petite amie, voire leurs enfants. On les a chassés de leur emploi parce qu’un infirme fait fuir les clients. Comment leur reprocher d’avoir envie de mordre, eux qui ont été déjà tellement mordus ?

Peggy pousse un soupir ostensible pour signifier qu’elle n’est pas dupe de ces grosses ficelles de télévangéliste.

— Aidez-nous, murmure Boyett en la fixant dans les yeux. C’est en votre pouvoir, ce sera pour vous l’occasion de faire une bonne action.

Peggy sait ce qu’il veut. Afin de payer les dernières traites de l’emprunt qu’elle a souscrit pour acheter « l’épave », elle a accepté d’assurer la surveillance d’un parc à requins. C’est un simple boulot de concierge qui consiste à vérifier les systèmes de sécurité et à contrôler la forme physique des squales évoluant à l’intérieur d’un périmètre délimité par des filets électrifiés. Les animaux sont la propriété d’un laboratoire pharmaceutique qui les utilise pour des greffes de cornée ou de peau, des études sur le squalène. Ce n’est rien d’autre qu’un vivier géant dont, trois ou quatre fois dans l’année, on sort un spécimen pour le convoyer vers un laboratoire de Miami, ou plus loin encore. En tant que plongeuse professionnelle, Peggy semblait toute désignée pour assurer la maintenance de l’enclos. Elle a posé sa candidature sans y croire ; on l’a recrutée immédiatement. Par la suite, elle a appris qu’elle avait été l’unique postulante. C’est un travail de routine, sans grand danger si l’on s’entoure des précautions nécessaires. Jamais on ne lui demande de Plonger au milieu des squales, elle est seulement là pour les nourrir et s’assurer que le filet de protection qui les isole de l’océan ne s’abîme pas. Quand l’un des animaux est malade, elle doit téléphoner au laboratoire qui dépêche un spécialiste. Certains des requins s’ébattant dans l’enclos valent très cher, en raison des traitements qu’on leur fait subir. Au début, Brandon s’était mis dans la tête qu’il s’agissait d’expériences militaires, elle lui a répondu que c’était idiot. Le Pentagone n’aurait pas recours à des civils pour surveiller ses investissements.

— Vous savez ce que je veux, dit Boyett d’une voix sourde de prédicateur filmé en gros plan à l’occasion d’une émission religieuse. Donnez-moi l’un de vos requins. Ou plutôt : vendez-moi l’un de vos requins, je vous le paierai un bon prix. J’en ai besoin pour ma thérapie.

— C’est absurde, siffle Peggy. Je n’en ai pas le droit et, de toute manière, vous n’êtes pas psychiatre. Vos méthodes ne reposent sur aucun fondement scientifique.

— C’est sûr, ricane Boyett. Moi, je n’ai pas appris dans les livres. Ce que je sais, je l’ai compris dans l’eau, au moment où l’on m’arrachait la jambe. C’est une autre sorte d’examen, vous ne croyez pas ?

La jeune femme s’applique à respirer lentement. Il est doué. Aucun argument ne le désarçonne.

— Votre entêtement devient suspect, souffle Larker. Je me demande s’il ne faudrait pas y voir une sorte de racisme. Le racisme envers les infirmes, on n’en parle jamais, mais il existe. Dès qu’on n’est plus complet, on passe de l’autre côté du miroir, on devient un mutant qui fait peur aux enfants. Je vous dégoûte, c’est ça ?

— N’essayez pas de me culpabiliser, dit Peggy, ça ne marchera pas. Je ne peux pas toucher aux requins de la réserve, certains valent une fortune. On les a bourrés d’implants, on leur a greffé des glandes ou je ne sais quoi. Leurs ailerons sont utilisés pour traiter les grands brûlés…

— Ça, c’est ce qu’on vous raconte, pour vous donner bonne conscience, insinue Larker. En réalité, ils alimentent bêtement l’industrie des cosmétiques. En fait de grands brûlés, ils servent à fabriquer des pommades antirides. Ce n’est pas de la recherche médicale, c’est de la foutaise.

— Nous avons déjà eu cette discussion, laissez tomber. Je ne prendrai pas le risque de me retrouver en prison pour vos beaux yeux. Si vous voulez un requin, allez le pêcher en haute mer. Il y a des tas de skippers qui vous loueront leur bateau et le matériel nécessaire.

Boyett soupire et manœuvre son fauteuil d’infirme dont les roues crissent sur le plancher.

— En haute mer, vraiment ? fait-il en levant les sourcils. Avec ma bande d’éclopés ? Vous nous voyez en train de manipuler des cannes, de hisser un squale à bord ? Vous ne comprenez pas que la mer nous fout une trouille de tous les diables ? Qu’à l’idée de grimper de nouveau sur un bateau nous chions dans notre froc ?

Il s’approche de la jeune femme. La pénombre qui règne dans la pièce accentue son charme de beau ténébreux.

— Votre réserve à la gomme, insiste-t-il, c’est comme une grande poissonnerie. C’est encore à notre portée. Pas besoin de bateau d’expédition en mer. Il suffit d’un gros container rempli d’eau salée et d’un camion. Une fois le requin capturé, nous le ramènerons ici, dans la piscine qui est derrière la maison. Je l’ai fait remplir d’eau de mer. C’est un sacré bassin, votre bestiau y sera à l’aise.

— Et qu’en ferez-vous ?

— Vous le savez bien. Nous nous rassemblerons, moi et mes gars, autour de la piscine, chacun armé d’un harpon, comme au temps des hardis baleiniers de Nantuckett, et nous commencerons à le larder de coups. C’est foutrement résistant, un requin, avec une peau pas facile à entamer. Quand on essaie de le harponner, c’est comme si on tapait dans un mur… ou dans un pneu de tracteur ; ça ne semble pas vivant. Mais c’est ce que nous voulons, ça sera plus long, pour lui… et pour nous. L’attente, c’est déjà la moitié du plaisir.

— Vous êtes dingue.

— Non. C’est ça ma thérapie. La revanche, la revanche longuement savourée. Je vois ça d’ici. Peu à peu, la piscine se remplira de son sang, et ce connard de poisson commencera à s’auto-dévorer. Vous savez qu’un requin blessé s’attaque à lui-même ?

— Parfois, oui. C’est l’odeur du sang qui le rend fou. Il se mutile la queue.

— Nous le mettrons en charpie à coups de lances, de gaffes, de piques ; bref, de ce qui nous tombera sous la main… Quand il sera tout à fait mort, nous le mangerons. Cru, à mains nues, pour lui rendre la monnaie de sa pièce. Et quand ce sera fait, alors nous pourrons recommencer à vivre. La malédiction prendra fin.

Boyett se tait. Il respire difficilement. La sueur fait briller son visage. « Il est fou », pense Peggy. Elle devine qu’il fait fausse route, que le sacrifice du squale ne le guérira pas. Il ne s’agit ni d’un envoûtement ni d’une cérémonie vaudou, mais d’une belle psychose solidement structurée. C’est pour cela qu’il est dangereux. Qu’ils sont dangereux, tous.

Il pose sa main sur celle de la jeune femme. Peggy s’en veut de laisser échapper un frémissement. Elle aurait voulu rester impassible, mais il est trop bel homme, ce genre de type qui n’existe d’ordinaire que sur les écrans des cinémas.

— Peg, chuchote-t-il, vous ne voulez vraiment pas nous aider ? Nous permettre d’échapper à cet enfer où nous croupissons, mes compagnons et moi-même ?

Sa main est brûlante. La jeune femme sent son visage s’embraser car elle vient d’imaginer cette paume sur son ventre, entre ses cuisses… et elle sait qu’il le sait. Elle se lève pour rompre le contact. Trop précipitamment.

— Je ne crois pas en votre thérapie, lâche-t-elle. Je comprends ce que vous endurez mais ce massacre ne servira à rien. Après avoir tué ce requin, vous découvrirez que vous êtes aussi mal qu’avant. Alors vous voudrez en tuer un autre, et encore un autre… Vous deviendrez comme ces chasseurs blancs du Kenya qui exterminaient les panthères, au début du siècle, parce que l’une d’entre elles les avait rendus boiteux. Le génocide ne vous rendra pas ce que vous avez perdu.

Boyett rit doucement. Un rire sourd qui roule dans sa poitrine.

— Peg ! Peg ! dit-il, pitié ! ne me servez pas cette vieille soupe, ce prechi-prêcha de dame pieuse, pas vous… Je sais que vous êtes une survivante, comme moi. Vous avez passé de sales moments et vous avez bien failli ne plus jamais sortir de la parenthèse où vous étiez enfermée. C’est faux ? Après l’assassinat de votre sœur vous avez sacrément déconné. On en parle encore dans certains bars assez spéciaux. Vous avez été très près de basculer dans le trou noir. Ici, au Club, nous en sommes encore-là… Au fond de la nasse, au fond du puits. Si nous ne tentons rien, nous finirons par nous faire sauter la tête au fusil de chasse. Quelqu’un comme vous devrait comprendre ça. Je sais que vous êtes une sympathisante, même si vous le cachez. Alors je vous le redis : aidez-nous. Vendez-moi ce requin. Le prix importe peu.

— Merde ! s’emporte la jeune femme. Ce n’est pas le vivier d’un restaurant de Miami Beach. On n’y puise pas comme ça. Il y a un registre des entrées. Si l’une de ces bestioles tombe malade, je dois aussitôt tirer la sonnette d’alarme et un vétérinaire débarque en hélicoptère dans les deux heures qui suivent. Votre foutu requin, les types des laboratoires verraient tout de suite qu’il est porté manquant.

Boyett hausse les épaules.

— Ça peut s’arranger, élude-t-il. Il suffit d’ouvrir un trou dans le filet qui délimite l’enclos. Ça vous fera un alibi.

— Peut-être s’il s’agissait d’une bête faisant un numéro dans un quelconque seaquarium pour touristes, mais pas dans le cas présent. Pas quand le requin en question représente un tel investissement. Il y aura une enquête, je serai virée. J’ai besoin de cet argent.

— On peut discuter d’une compensation…

— Non. Fichez-moi la paix. Et dites à vos sbires de ne plus rôder autour de chez moi.

Boyett lève les mains au ciel pour signifier qu’il est impuissant devant ce genre de chose.

— Je ne les contrôle pas, fait-il d’un ton qui n’a plus rien d’aimable. Ce sont des gars un peu dérangés, instables, aux réactions émotionnelles excessives. C’est vrai qu’ils peuvent se laisser aller à des initiatives dangereuses, mais qu’y puis-je ? Ils comprendraient mal que j’intervienne en faveur d’une femme qui s’obstine à être notre ennemie… et qui affiche un tel dégoût pour les infirmes.

— Plus de pièges dans mon jardin, martèle Peggy. Plus de sang à transfusion dilué dans l’eau quand je suis en plongée… ou bien je porte plainte pour de bon.

Boyett a un sourire méchant.

— Les flics ne vous écouteront pas, Peg, siffle-t-il. Vous avez mauvaise réputation dans l’île. Vous savez bien : toutes ces histoires qu’on raconte dans les bars…

La jeune femme lui tourne le dos et quitte le bureau. Borowsky ricane en la voyant passer. Dans le jardin, trois infirmes boivent de la bière en exposant leurs cicatrices de morsure au soleil. Des touristes les photographient. Les séides de Larker Boyett prennent complaisamment la pose.

Peggy grimpe dans la Dodge. La colère l’étouffe. Elle n’est pas idiote, elle a parfaitement perçu les menaces de Boyett. Il prépare une nouvelle saloperie. Il va la harceler, jusqu’à ce que les choses finissent mal.

Elle démarre. Au moment où elle s’engage dans le flot des voitures, elle réalise qu’elle ne lui a pas parlé du cylindre de métal découvert dans l’épave.

Baignade accompagnée
titlepage.xhtml
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_000.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_001.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_002.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_003.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_004.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_005.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_006.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_007.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_008.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_009.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_010.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_011.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_012.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_013.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_014.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_015.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_016.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_017.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_018.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_019.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_020.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_021.html
Brussolo,Serge-[Peggy Meetchum-2]Baignade accompagnee(1999).French.ebook.AlexandriZ_split_022.html